Je
maudissais cruellement ma petite taille et mes courtes jambes. À la
manière de Gnas un peu plus tôt, Evi était partie à toute vitesse
devant nous. Sans même utiliser sa luciole, ni même dégainer son
épée lumineuse. Voilà bien la peine de vouloir simplifier la vie
des autres. Tout ça pour quoi ? Rien, se retrouver tout seul
dans une caverne à la traîne, tout ça parce qu'on ne brandit pas
une arme au-dessus de sa tête ou que l'on aime pas spécialement se
rouler dans le sang.
Humainement, affronter tant d'adversaires et survivre, serait déjà un exploit en soi. Elle, intouchable, surplombait son œuvre, spectatrice de sa propre puissance. Cette image me terrifiait quelque peu. Un long frisson me parcourait le dos. Je ne souhaitais qu'une chose, sortir au plus vite de cette grotte.
Cela
dit, je ne sais pas si j'avais voulu faire partie de la première
ligne. Errer m'avait finalement conduit au niveau inférieur, régnait
d'ailleurs ici aussi, la même odeur qu'au dessus : celle de la chair
carbonisée et du sang frais. Mes yeux se perdaient au plafond, mon
pied venait de se prendre dans quelque chose. La lumière produite
par la luciole ne laissait paraître qu'à mes yeux un spectacle
lugubre, j'avais heurté une jambe, déchiquetée, parmi tant
d'autres morceaux de femmes et d'hommes, jonchant le sol de pierre.
Les torches murales avaient été projetées dans tous les sens. Les
parois, elles, étaient couvertes de sang, d'organes; des râles
d'agonie brisaient la monotonie des ploc ploc provenant des gouttes
de sang coulant, ça et là.
Pour
la première fois, je n'étais pas rassuré par l'ambiance du lieu.
Je pressais ma marche et commençais à apercevoir droit devant moi
une autre lumière vive, sûrement celle de la flasque de Gnas. Le
tapis de cadavres se poursuivait aussi ici. J'arrivais enfin aux
filles.
"Laquelle
de vous deux est responsa..." Je ne terminais pas ma phrase,
constatant qu'Evi', se tenait au milieu de plusieurs corps, la lame
encore dégoulinante. Elle ne semblait même pas être blessée,
impassible, le visage tout taché, et son vêtement luisant de tout
le sang qu'elle avait fait couler. Gnas circulait non loin d'elle,
s'accroupissant au détour de certaines victimes, saisissant leurs
dépouilles et restes. Les examinant.
"Waouh,
tu y as été fort. Il y en a même un dont tu as fendu le crâne
sans même briser une seule de ses dents. Incroyable ! Lâchait
Gnas, la voix enjouée.
-Barbare
sanguinaire.. Cela ne justifie pas un tel car... Je
m'interrompais devant la main levée d'Evi'.
-Elle,
là. Evi'
désignait maintenant du bout de sa lame une tête -bien amochée-
détachée de son corps d'origine.
-Tiens,
mais c'était elle qui m'avait tirée dessus. Gnas
se mettait à quatre pattes, farfouillant dans les débris divers.
Elle en sortait deux armes identiques à celle de l'autre
jour. C'était
donc ça, le bruit et les boules de plomb.
-Elle
avait l'air surprise de me voir. Outre la peur, dans ses yeux, il y
avait de l'étonnement. Mais je pense qu'elle délirait. La pauvre
avait déjà pris quelques coups dans les gencives.. Gloussait
Evialg.
Je
ne l'avais jamais entendue comme ça. Riant d'un massacre, dont elle
était en partie la responsable. Le prix de sa vengeance pouvait-il
se compter en tant de vies prises par son épée ? Tous ces gens-là
avaient aussi une vie. Avec des sentiments, des souvenirs.
Quand bien même étaient-ils aussi des tueurs. La mort allait-elle
sans cesse être la solution ?
-Je
ne saisis pas totalement Evi. Glissais-je
tout en attirant son regard. Le
sang, la mort, la douleur... est-ce vraiment ce qui doit animer votre
vie ? Ne serions-nous pas des destructeurs de souvenirs, nous qui
errons en quête de notre his...
-Ne
confonds pas vengeance et prévoyance Tne. Evi'
m'interrompait à nouveau. Ces
femmes et hommes étaient tous des bandits, tous sans exception. Ses
yeux se durcissaient. Qu'est
ce que tu connais au vice, toi ? Ces raclures étaient sûrement tout
autant violeurs que pillards.
Je
ne savais pas de quoi parlait-elle exactement, mais la rudesse de son
ton témoignait d'une haine virulente. Quoi qui puisse avoir motivé
une telle violence, elle l'avait exprimée avec une férocité sans
pareille.
-Ce
que tu as fait là... C'est une réelle boucherie, digne d'un champs
de bataille. Tu n'es pas blessée ? Lui
demandais-je, essayant de me focaliser sur elle, et pas sur le
carnage dont elle était l'artisane.
-Non." Me
répondait-elle sèchement.
Humainement, affronter tant d'adversaires et survivre, serait déjà un exploit en soi. Elle, intouchable, surplombait son œuvre, spectatrice de sa propre puissance. Cette image me terrifiait quelque peu. Un long frisson me parcourait le dos. Je ne souhaitais qu'une chose, sortir au plus vite de cette grotte.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire