"Ce
n'est pas la mort non plus, Evi'. Lui
glissais-je, en l'attirant à nouveau contre moi. La
couleur de ton arme ne définit pas celle de ton âme.
-Peut-être
mais. Elle semblait pensive. Quand je vois ma mère,
ce qu'elle a fait et ce qu'elle veut obtenir, j'ai peur d'être
condamnée. Puis ce n'est pas comme si j'étais complètement
innocente.
-Personne
ne l'est vraiment, tu sais. Enchérissait Tne'.
-Ça
c'est sûr. Le coupais-je. Tu en es la preuve
vivante. Tu n'as peut-être rien fait de mal. Mais tu es un pervers.
-Tout
à fait ! Lâchait-il en hochant la tête, puis il se
rattrapait. Quoi ?!
-Hahaha,
les aveux sont faits. Le taquinais-je. De toute manière,
nous le savons bien toutes les deux. Et rien que pour ça tu n'es pas
innocent.
-C'est
bien l'hospice qui se fout de la charité. Rétorquait-il en
soufflant.
-Je
n'ai jamais dit que je l'étais. Riais-je, tout en plantant
mes yeux dans ceux d'Evi'. Je dirais même que je suis moins
innocente qu'avant !
-Sauf
que quand on se roule dans le sang des personnes que l'on a au
préalable tuées, on est tout sauf innocent. Donc de base...
-Et !
Au moins je prends mon pied en faisant ça. Pendant que d'autres
tirent des mines de six pieds de large...
-De
long. De long, Gnas.
-Oui
bon ça n'en change pas la mesure pour autant. Ce que je voulais dire
c'est que je ne ressens pas ça comme tuer quelqu'un. Même si c'est
le cas, un peu.
-Tu
veux dire que tu ne te venges de rien ? Tu te bats... Evi
réfléchissait. Pour le sport ?
-Pour
les sensations, surtout. Mais je crois avoir trouvé presque aussi
bien, peut être mieux même.
-Et
alors, ça consisterait en quoi ? Boire le sang de créatures
légendaires ? Pendre des enfants par les oreilles et danser devant
? Ironisait Tne.
-Tout
de suite les mauvaises idées. Non rien de cela. Mais c'est
secret. J'avais les idées roses, mon corps avait faim, une
faim que je ne connaissais que depuis peu. Avoir vu Evi' nue
tout à l'heure, avoir pu admirer ses seins fermes et ses tétons
tous raides, m'avait donné l'eau à la bouche. Seuls les
concernés apprendront hehe.
-Donc
tu ne ressens aucune colère quand tu te bats ? Me demandait
Evi'.
-Bah
non. Enfin si, quand je me suis battue contre ta copie l'autre jour,
j'étais remontée comme un coucou. Mais sinon, je n'ai aucune raison
d'être en colère. J'imaginais que c'était le cas pour tout le
monde. Pas toi ? Pas vous ? Me reprenais-je, incluant Tne,
tout en sachant que lui ne se battait jamais ou presque jamais.
-J'ai
pris de mauvaises habitudes, je crois. Lançait Evi'. Ou
peut-être que je fais les mauvais liens entre mon histoire et les
responsables de ce qu'il m'était arrivé. Quoi qu'il en soit quand
je me bats je suis assez enragée.
-Moi
je me suis pris la tête avec un herboriste, une fois. Et si personne
ne l'a retrouvé, il vit sa vie de plante verte, tout bonnement. Les
pieds dans la terre. J'étais tellement en colère.
-
Attends. Toi quand tu es en colère tu transformes les gens en plante
? L'interrogeais-je.
-C'est
peu commun comme vengeance. Cela dit... C'est le comble. Un
herboriste changé en plante... Pouffait Evi', un peu plus
détendue.
-Je
n'avais pas le choix. Appuyait-il.
-Une
plante.. Je regardais Evi', et nous riions au même
moment. C'est ce qui s'appelle être vert de rage
hahaha. J'étais tordue de rire.
-Peut-être
que quand tu seras très très en colère, tu transformeras quelqu'un
en arbre. Cela prouvera ta graaaaande colère. Gloussait
Evi'.
-Vous
faites bien la paire, tiens. Je n'y peux rien moi si je ne peux
pas faire apparaître d'arme. Ronchonnait-il.
-Et
encore. L'invoquer serait une chose... Commençait Evi'.
-Mais
réussir à la porter serait encore autre chose. Continuais-je
en pleurant de rire.
-C'est
vrai que vu comme ça... Tne lui aussi se mettait à rire aux
éclats. Je pourrais être le premier aplati par sa propre
arme."
Nous
étions tous les trois envahis par une hystérie collective tandis
qu'un bruit abyssal coupait notre folie.
"Pardon. Peinait
à dire Evi'. Je
crois que je meurs de faim.
-Ça
tombe bien. Je crois qu'il y a une auberge dans le petit village que
nous avons traversé, avant de nous retrouver dans cette forêt
humide.
-Un
village ? Mais l'île n'est pas déserte ? Je croyais que... Lançait
dubitative Evi'.
-La
première fois où je t'ai trouvée ici, c'était le cas. Mais je
pense que les tropiques attirent de plus en plus. Un petit hameau
tout récent a été construit près du pont qui relie l'île au
continent. Terminait Tne.
-Parfait.
Moi aussi je suis affamée. Poursuivais-je. Du
village arbi.. arboti...
-Arboricole,
peut-être, c'est ça ?
-Oui
voilà, le village dans les arbres où habite ta Chachatte. C'était
loin quand même. Un jour et demi de marche. Puis les provisions
qu'on nous avait laissées... Merci, hein. Des boulettes de plante et
du pain de racine.. Ça va pour... Je croisais le regard un
peu contrarié de Tne. Oui, toi ça te va, d'accord. Moi pas.
-Sa
Chachatte ? Demandait floue Evi'.
-Mais
oui, tu ne te souviens pas ? Je me rendais compte qu'elle
devait être sacrément secouée quand même. Tne a le béguin
pour la nouvelle Grande Prêtresse. Je gonflais ma voix pour
paraître plus sérieuse. Qui a été nommée lors du rituel des
pleines lunes. Elle a une sacrée paire de.. Enfin de toute façon,
on ne voit que ça quand on les rencontre. Cela ne m'étonne donc pas
que Tne soit tombé sous le charme.
-Tu
raccourcis bien les choses quand même. Crachait-il.
-C'est
toi qui a failli te faire raccourcir, alors du calme le
nain. Laissais-je échapper en pouffant. Ah oui,
l'autre détail de cette charmante tribu. C'est qu'elles se
transforment toutes en gros chat, tu te souviens ? Comme celui de la
forêt.
-Celui
qui nous est tombé dessus ? Me demandait-elle d'un ton assez
furieux.
-Oui. Je
sentais qu'elle allait se mettre réellement en colère. Mais pas
de mipré... Euh. Ne te trompe pas, elles ont dit que leurs mâles
étaient stupides et qu'ils n'avaient rien à voir avec elles. Enfin
je crois. C'est ça ? Questionnais-je Tne.
-Comme
quoi, tu ne faisais pas que regarder les étoiles. Ça peut t'arriver
d'écouter.
-Heureusement
qu'elles n'ont rien à voir avec l'autre. Sinon je me serais sûrement
vouée à devenir bûcheron. Grognait Evi'.
-Elle
s'est... Tne revenait sur ses mots. Elles se sont
bien occupées de moi. La coupe est vide. Enfin pleine. Se
corrigeait-il à nouveau, sous nos deux regards insistants. Certes,
j'étais destiné à une fin bien solitaire, mais que nous soyons
réunis tous les trois, prouve bien l'inverse.
-Il
bredouille parce qu'ils ont passé toute la nuit avant notre départ
à faire des galipettes dans la hutte.
-Comment
tu le sais ?! Tu écoutais à la porte ?! S'indignait Tne.
-Pas
du tout. Mais je me doutais que c'était le cas. L'évoquer a suffit
à te le faire avouer ahah. C'est de la psochy... Pyso... Enfin le
truc long inversé.
-Tu
parles de psychologie inversée ? C'est bien savant pour
toi. Me disait Tne, vexé de s'être fait rouler.
-C'est
Eruxul qui m'a dit ça. Il m'a dit que les secrets s'obtenaient comme
ça. Sifflais-je toute fière d'avoir retenu comment cela
fonctionnait.
-Bref.
Quoi qu'il en soit Evi'. Cette tribu n'est pas notre ennemie. J'étais
amené à mourir parce que leur localisation doit restée secrète.
-Tant
mieux. Elle s'était dégagée de mon étreinte et venait de
se lever, difficilement et encore toute nue, faisant se retourner Tne
en un l'instant. Bon, peut-être pourrions nous partir en
direction de l'auberge. Nous confiait-elle, tout en s'étirant
face à l'océan limpide et brillant.
-Je
pense quand même que tu devrais te vêtir un peu. Il est certain que
la plage donne envie d'être si peu habillé, mais là... Il
devait fouiller dans son fourre-tout en même temps, car ses mots
étaient entrecoupés de bruit de froissement et de cliquetis de
fiole. Tiens, c'est un peu simple comme tenue, mais tu n'es
pas nue au moins comme ça. Il tendait à l'aveugle un grand
pans de tissu.
-Ça
fera l'affaire. Disait-elle avant de s'enrouler dedans,
cachant a mes yeux, son dos finement et délicieusement musclé. Elle
s'approchait de mon visage. Tu crois que tu pourrais me porter
jusqu'à là bas ? Chuchotait-elle à mon oreille, me faisant
vaciller.
-Ce
que tu voudras. Lui répondais-je, rougissante et excitée."
Je
la saisissais sous les genoux et sous le buste, hissant son visage
près du mien. Je posais sur sa poitrine une main, qu'elle rejoint de
la sienne, tout en encerclant mon cou avec l'autre. Nos regards se
croisaient encore une fois, nos visages se rapprochaient, nos lèvres
se mélangeaient sous le regard médusé de Tne'. Nos salives nous
réchauffaient, sa langue me faisait mouiller abondamment, si nous
continuions quelques secondes de plus, je l'aurais sûrement dévorée.
Là, sur cette plage, sans plus attendre. Mais il y avait Tne', je
décollais donc sagement ma bouche de la sienne, et je constatais que
ses grands yeux blancs n'avaient jamais été aussi beaux que bordés
par ses joues, qui comme les miennes étaient écarlates. Ses
paupières, malicieusement entre-fermées me laissaient tout de même
percevoir, que dans le reflet de ces deux perles, j'y étais. Elle
aussi, tout en se mordant la lèvre supérieure, m'affirmait que nous
convoitions la même chose.
"Toi"
disions nous en cœur, face contre face. Un silence suivit cet aveu,
rompu par le chant des vagues qui allaient s'éclater sur les pans
rocheux non loin de nous. L'astre diurne avait déjà bien entamé sa
lente descente et colorait la houle d'un million de reflets vermeils.
Je me rendais compte à cet instant que je n'avais jamais vu l'océan,
je n'avais jamais pu constater sa beauté et pu prendre le temps
d'admirer son corps infini s'étendre et se rétracter, sans cesse.
Néanmoins, je comparais les lames de fond qui sillonnaient cette
splendide étendue saline avec les immenses dunes que j'avais franchi
un nombre incalculable de fois en errant dans le désert. Je me
disais que le sable dans lequel je trempais actuellement mes pieds
n'était pas bien différent de celui qui avait frappé ma peau
pendant ma longue traversée, des mois, voire des années durant.
Alors que je rêvassais, tout en jouant à laisser couler le limon
entre mes orteils, nostalgique, Evi me tapota l'épaule, et je
constatais que le nabot avait entamé la marche. Je me retournais
donc, laissant derrière moi cette grande mare, et les clapotis que
le reflux marin générait. La porter ne me demandait presque aucun
effort, elle était si peu ballottée que peu de temps après notre
départ, elle s'était endormie, mes bras l'encerclant et la
protégeant, j'aurais sûrement fait pareil à sa place.
La
mélodie maritime avait été lentement remplacée par les
gargouillis provenant d'une tourbière, les gazouillis d'oiseaux et
les sinistres craquements de vieux arbres, qui désormais
emplissaient l'atmosphère moite de cette sylve sauvage. Des fleurs
géantes aux couleurs flashies et paranormales agrémentaient le
tapis forestier, masquant un ballet composé de milliers de racines,
dansant et s'entortillant les unes avec les autres. Les rayons de
soleil qui parvenaient à traverser le feuillage, formaient des
faisceaux ocres, tamisés par la poussière soulevée par notre
cheminement et les spores qui parsemaient l'air. Je laissais traîner
mon nez sur chacune des senteurs qui balayaient le lieu : la
fragrance pourrie émanant des plantes et fruits gâtés me faisait
penser au sucre, la tourbière fourrée de corps d'animaux en
décomposition, que nous apercevions par moment sentait autant le fer
que le sang; le tout se mélangeant pour nous offrir une odeur entre
le délice et la putréfaction. Cette mangrove était aussi belle que
mystérieuse, nous nous étions cependant rapprochés pour ne pas
nous égarer. C'était bien la dernière chose qu'il fallait faire.
Bien que cette île selon Tne' n'était pas immense, passer plusieurs
heures dans cette forêt tropicale pourrait causer notre perte, du
fait de la toxicité inhérente aux odeurs que je prenais pourtant
plaisir à renifler. Je constatais qu'hormis les volatiles qui
nichaient bien au-dessus de nos têtes, abrités dans la canopée
nous surplombant; nous n'avions pas croisé une seule bestiole
vivante. Les dires du nabot-ailé se confirmaient donc. Je le voyais
par moment arracher tiges, pistils, plantes et étamines en tout
genre dont il fourrait ses fioles. J'avais drapé le visage d'Evialg
dans son étole, sans provoquer son réveil; prenant le risque de
trébucher sur un obstacle que je n'avais pas envisagé, trop occupée
à la regarder elle, endormie et angélique, comme si lorsque ses
yeux étaient fermés, elle redevenait une enfant, calme et rêveuse.
Tne' qui depuis le début ouvrait notre lente avancée, me fit signe
de la main de me stopper, il tendit sans faire le moindre bruit son
doigt en direction d'un bosquet dans lequel une bête semblait
paître. L'animal, dont on ne distinguait que le corps pour
l'instant, était quadripède, et ressemblait à un cerf, il devait
faire notre taille au garrot et semblait être autant fait de chair
que de plantes; son pelage en effet, était recouvert de fleurs et
champignons qui avaient l'air de lui pousser dessus. Nous
l'entendions soulever le tapis de feuilles, sûrement pour y chercher
sa nourriture, puis finalement, sa tête nous apparaissait. La
créature avait une double paire de bois qui devait faire trois fois
la taille de son crâne, desquelles des ramures partaient dans les
tous sens, pointues comme des pieux et blanches comme l'ivoire. Son
museau était allongé, et cachait une gueule pleine de crocs, il y
trônait un morceau de viande dégoulinant, que le monstre venait de
détacher de la proie que nous ne pouvions pas voir et qu'il dévorait
bruyamment. Cette vue fit gargouiller mon ventre et attira
l'attention de l'étrange être. Scrutant à ses pieds, Tne' souleva
une branche et la jeta au pied de l'animal, qui plutôt de nous faire
front, arracha la dépouille du sol, et s'enfuit en un éclair,
traversant buissons et fourrés en bondissant frénétiquement. Mon
compagnon se retournait vers moi, à moitié en colère et à moitié
effrayé, comme si nous venions d'éviter de nous faire dévorer.
"Heureusement
qu'il est parti... Je n'aurais pas voulu être son
casse-croûte. Lâchait-il à voix basse.
-C'est
plutôt l'inverse qui se serait passé non ? Lui
répondais-je, tout aussi bas.
-Je
n'en aurais pas mis ma main à couper. Il avait l'air dangereux. Tu
ne peux pas faire moins de bruit ? Rageait-il, toujours
sans hausser le volume.
-Je
n'y peux rien si j'ai faim, moi ! Chuchotais-je. Puis
c'est quand qu'on arrive, j'en ai marre de la forêt.
-Nous
sommes tout proches je pense. Les arbres décroissent petit à petit.
-D'accord.
Hé dis. Lui soufflais-je.
-Quoi
?
-Tu
crois que c'est considéré comme manger un légume de manger cette
bête ou pas ? Riais-je.
-Rolala.
Parfois on dirait que tu le fais exprès hein. Allez ne traînons
pas.
-D'accord
d'accord. Acquiesçais-je, tout en recalant Evialg contre
moi."
Tne
avait vu juste, les arbres ne firent que devenir de plus en plus
petits à partir de ce moment et quelques minutes plus tard, nous
atteignions enfin la sortie de l'émeraude toxique. L'océan se
profilait à nouveau à l'horizon et nous arrivions par la même au
petit village côtier. Les maisons du coin étaient faites de
feuilles et planches prélevées et fabriquées depuis la flore
locale, et donnaient ainsi à leurs huttes, un style vraiment très
différent des chaumières du continent; le tout formant un ensemble
très hétéroclite au vue des fantaisies que chaque habitant avait
mis en avant. L'auberge se distinguait des habitations par sa taille
plus imposante et par la présence de pierres blanches à la base du
logis, qui assuraient au local une solidité sûrement plus
importante que les cabanes qui l'alentouraient.
La
bâtisse ressemblait à une immense botte sur deux étages, et
possédait une terrasse donnant sur une lacune sur laquelle se
reflétait les dernières ondes orangeatres du Soleil, lacune qui,
elle-même était irriguée par un maigre bras de mer. De larges
bancs et tables en bois exotique agrémentaient cet espace extérieur,
et malgré que l'emplacement fut idéal et charmant, seul un couple y
séjournait actuellement. Je réveillais Evi en lui apposant un
baiser sur la joue, elle poussait un petit grognement adorable, puis
ouvrait les yeux avant de s'étirer et de rejoindre la terre ferme.
"Que
c'est beau ici. S'exclamait-elle, en attirant et pressant ma
main avec la sienne.
-Peut-être
allons nous enfin pouvoir nous la couler douce. Suggérait
Tne d'un ton incertain.
-Se la
couler douce ? Lui demandais-je. Ça n'intéresse
personne de se noyer.
-Ça
veut juste dire profiter. Avoir du bon temps.
-Aaaah.
Oui alors, je comprends. Je connais un super endroit comme ça...
C'est à... Je réfléchissais en pensant à Evi et à ce que
j'avais fait là-bas. C'est à Bourg-en-Or, une superbe
auberge avec des bains... Géniaux ! La ville est remplie
d'idiots mais bon c'est opto.. ipto...
-Optionnel
? Me corrigeait Evi.
-Oui,
merci. Optionnel, voilà. Peut-être y irons nous tous les trois un
jour ! Lançais-je enthousiaste.
-C'est
vrai que c'est une jolie ville Bourg-en-Or. Mes précédents voyages
m'y ont déjà fait séjourné et... Attends. Il
réfléchissait. Était-ce un établissement avec une
lumière rouge, des bains taillés à même la pierre et.. Tu étais
dans un bordel Gnas. Pas une auberge.
-Un
quoi ?
-Un
établissement où l'on paye pour avoir des rapports sexuels. Un
bordel. Reprenait Evi en me regardant bizarrement.
-Ah.
Bah oui alors. C'était ça. C'est aussi dans ce village que j'ai
acheté Masa-truc. Mon arme vibrait et m'envoyait comme une
petite décharge de douleur dans le dos. Hé ! Même mon
arme me reprend quand je dis mal un mot maintenant. Ça va oui ? À
ces mots les deux autres me regardèrent comme si j'étais entrain de
délirer. Je vous jure ! Mettez votre main dessus. Ils me
prirent encore pour une folle, alors je m'approchai d'eux en me
retournant, les incitant à la toucher, ils s’exécutèrent. Masa-truc
! Dis-je à nouveau, amenant mon sabre à vibrer à une
seconde fois.
-Aïe
! Lâchaient-ils à l'unisson.
-Je
vous l'avais bien dit !
-Elle
est vraiment étrange cette arme. S'étonnait Tne.
-C'est
sûr qu'elle n'a rien de commun. S'enquérissait Evi'. Pour
en revenir à ce que tu disais, Tne, je ne suis pas contre profiter
un peu du calme aussi. L'endroit est désert et bien isolé, les
ennuis ne devraient pas nous poursuivre ici. Avançait Evi'
d'un ton apaisé.
-Il ne
reste plus qu'à nous assurer que la nourriture et les boissons sont
bonnes, et le tour est joué ! Pâmais-je, optimiste et
contente de pouvoir enfin me nourrir."
Nous
allions entrer dans la charmante taverne, lorsque la porte s'ouvrit
devant nous, et qu'un homme aux bras recouverts de plume, et au
faciès d'oiseau nous accueillit.
"Bonjour
et bienvenu au Cormoran Niché ! Je m'appelle Ghast et je suis
heureux de vous proposer repos et repas dans mon humble
établissement. S'exclamait-il à une vitesse incroyable.
-Regarde
Tne, c'est un cousin à toi ! Gloussais-je.
-Excusez-la. Emboîtait
Tne. Elle ne sort pas souvent alors...
-Il
n'y a pas de mal. Reprenait tout aussi rapidement
Ghast. Peut-être a-t-elle raison, après tout. C'est si
rare de voir un autre Hulote hors de la Cité-Perchée, je ne saurais
pas dire depuis combien de cycles ma femme et moi n'avons pas vu un
de nos semblables. Bien que je décèle que tu sois à moitié humain
et à moitié Hulote, ça fait quand même plaisir !
-Tout
le monde me dit ça, mais je ne saurais en affirmer moi-même. Merci
pour cet accueil en tout cas. Ce n'est pas souvent que l'on nous
ouvre aussi sympathiquement la porte.
-Bientôt
ils vont roucouler tu crois ? Ou se prendre le bec, qui sait
? Murmurais-je à Evi', qui camoufla son rire.
-Nous
serions enchantés de séjourner dans votre auberge quelques jours et
nuits, si vous avez des chambres de disponible. Comblait Tne,
pour éviter que nous nous fassions mal remarquer.
-Oh
oui, il nous reste de la place. Vous savez, cette île est peu
visitée, déjà parce qu'elle est excentrée et puis..
-Et
puis ? Poursuivait Evi', qui essuyait les larmes de rire
qu'elle avait au coin des yeux, reprenant rapidement tout son sérieux
à ma grande surprise.
-Les
ouragans sont assez fréquents au large de l'île. Cela effraie
beaucoup des potentiels touristes qui pourraient venir profiter de
cette terre de cocagne et de son soleil radieux.
-Les
aléas climatiques il y en a partout pourtant. Intervenait
Tne'.
-Hmmm. Ghast
semblait pensif, comme s'il savait quelque chose en plus.
-Sauf
que le climat n'a rien à voir avec ces ouragans, c'est ça
? Essayais-je
de faire fonctionner la psychologie inversée une fois de plus.
-En
nous installant ici, ma femme et moi, avons croisé un vieil homme
qui nous a alors dit : "Méfiez-vous, par tous les temps, du
léviathan lévitant, car si l'envie lui prend, recouvrira l'île
d'une pluie et d'une tempête qui durera durant tout temps".
-C'est
pas piqué des vers cette prophétie. Tne se cognait le
visage, ayant provoqué chez Evi et moi un fou rire. Voilà que
je m'y mets moi aussi.
-Allons,
allons, n'ayez crainte, l'humour n'a jamais mérité que l'on se vole
dans les plumes. S'exclamait le tenancier nous faisant nous
effondrer de rire l'une sur l'autre.
-Vous
ne devriez pas les lancer vous savez. Elles sont difficiles à
arrêter; d'expérience, croyez-moi. Maugréait Tne, honteux
de notre réaction.
-Ne
vous inquiétez pas et entrez, en vous voyant arriver depuis
l'intérieur, je me suis tout de suite dit que vous deviez être de
bonne compagnie. Vous préparé-je trois chambres ?
-Juste
deux suffiront. Réagissais-je sans perdre un instant et en
jugulant l'ironie qui me tordait en deux.
-Très
bien, je vais faire ça. D'ici là, vous pouvez profiter de l'eau de
la lacune. Elle a chauffé toute la journée sous le soleil, elle
devrait être à température idéale pour vous prélasser.
-Nous
ferons cela, je pense. Acquiesçait Tne. Par
contre, vous parliez de votre femme, où-est-elle ? Lui est-il arrivé
quelque chose ?
-Pas
du tout. Riait-il. Elle dort ! Ma femme est une Hulote
Effraie, elle a plus de facilité à vivre de nuit que de jour.
-J'ai
tout à apprendre des Hulotes, j'espère que vous pourrez me parler
davantage de notre peuple et de la "Cité-Perchée" durant
notre séjour. Quémandait poliment Tne à Ghast.
-C'est
avec grande joie que nous le ferons ! Dois-je vous servir quelque
chose avant d'aller m'occuper de vos quartiers et que vous alliez
batifoler dans l'eau ?
-Une
bière ! Répondions-nous tous les trois en même
temps.
-Et à
picorer ! Complétais-je. Mais pas des graines !
-Je me
doutais bien que vous n'aviez pas un appétit de
moineau. Rétorquait-il en provoquant l'hystérie dans notre
petit groupe."
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